La Cantante de Tango (La chanteuse de Tango)
DU PATHOS A LA DISTANCIATION
LA CANTANTE DE TANGO appréhende sans concession la douleur de la dépression amoureuse, ou plutôt du désespoir auquel livre l’abandon amoureux. Les rythmes de tango et l’interprétation des textes emplis de sentiments ponctuent majestueusement le récit, ancrant une dynamique métatextuelle sensible. Le spectateur assiste à la mise à nu de la protagoniste principale, Helena (Eugenia Ramirez), sans concession ; plus encore il en éprouve, épouse avec force le pathos. Néanmoins le film souffre d’un rythme cruel qui en devient agaçant : la centralité de la jeune femme s’en trouve même ébranlée. L’approche esthétique d’abord sensible tend irrémédiablement à une iconographie pure ; une construction en tableaux, une mise en « images », juste, sensible, ponctuellement sensationnelle du ressenti, du trouble de Helena qui conduit le spectateur à une regrettable distanciation.
L’écriture est pourtant soignée, chaque situation est à la fois juste et sensationnelle. Mais aucune respiration n’est possible. Seule la musique, bien que celle-ci renvoit indéniablement au ressenti de la protagoniste, permet au spectateur de s’échapper. L’emploi de l’hypothèse musicale est plus que riche : non seulement il met en place une dimension métadiscursive mais plus encore il permet d’épouser le point de vue de Helena sur sa propre situation.
D’emblée les gestes de la jeune femmes, l’interaction de son corps avec l’espace deviennent l’objet même de la captation filmique. La mise en scène tend alors à un réalisme radical. Mais si les mouvements quelques fois incessant de la caméra fatiguent, une artificialité quelque fois caricaturale rompt la force première en annihilant le réalisme de l’ensemble. De plus la suresthétisation dont témoigne le réalisateur est épuisante : il semble envisager tous les possibles représentatifs au point de perdre toute singularité malgré une sincérité criante. Pourtant celle-ci donne au film un réel charme, salvateur.
LA CANTANTE DE TANGO
LA CHANTEUSE DE TANGO
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Réalisation : Diego Martinez Vignatti
Belgique / France / Espagne – 2009 – 102 min
Distribution : Cinéart
Drame
Un Evénement. Ce film tant attendu est enfin sorti. Eugenia Ramirez y montre non seulement un talent de comédienne en apportant par son impressionnant travail une atmosphère qui vous conquiert de bout en bout, mais y montre de plus un incroyable talent d’interprète de sublimes Tangos chantés qui vous transpercent de frissons. Quant a Diego Martinez Vignatti, il arrive à vous entrainer dans ses superbes images qui vous absorbent entier, les yeux rivés à l’écran, tout plein plongé dedans. Avoir vécu et partagé ces émotions avec le public d’une salle comble et conquise au festival de Locarno permet d’écrire que ne pas voir « la Cantante de Tango », c’est carrément manquer un captivant moment, à vivre au grand écran, évidemment!