Eyes Wide Open (Tu n’aimeras Point)
Dans un univers ultra-orthodoxe où la liberté n’a pas droit de cité, un monde clos fermé sur lui-même – où l’absence de réel média devient paradigmatique de ce replis, envisager vivre son homosexualité semble être une gageure impossible. Ancré dans ce contexte d’extrémisme religieux, un désir interdit ébranle deux hommes que le hasard rassemble. Un émoi partagé et une terrible confusion admirablement mis en scène par Haim Tabakman qui insuffle à son premier long métrage une dimension âprement humaine. Fort de la mise en place d’un réel langage cinématographique, le réalisateur aborde frontalement deux thématiques fortes dont la réunion devient vecteur de sens au point de se révéler un sensible pamphlet pour la liberté d’être.
Le désir homosexuel et la vie religieuse se confrontent littéralement. La fine approche scénaristique permet d’envisager la place du désir, et au-delà la dimension personnelle, dans une société extrêmement normée imposant des canons comportementaux castrateurs. Si la critique du repli de la communauté ultra-orthodoxe de Jérusalem sur elle-même est évidente, elle ne prime cependant pas sur le sujet premier du film, la relation amoureuse – impossible parce que condamnée – de deux hommes juifs répondant à l’appel de la chair. La simplicité du désir est confrontée à l’ardeur de sa condamnation. Pourtant, intelligemment, Tabakman présente des hommes juifs étudiant les textes religieux, discutant la notion de pêcheur … Il parvient ainsi à mettre en scène la dure et triste opposition entre l’ouverture d’esprit dialogique et la radicalité comportementale préférant la condamnation pure et simple des actes considérés comme impurs.
Le réalisateur réussit à mettre à nu le fonctionnement d’une pleine communauté. Cependant la sensation d’oppression vécue par les protagonistes est perceptible grâce aux choix esthétiques du réalisateur qui parvient à mettre en place un hors-champs révélateur. Tabakman privilégie l’importance des gestes et des regards. Les hésitations et les silences conduisent à une déchirante tension. La complicité unissant les deux protagonistes prend vie en les présentant conjointement au spectateur, leur attitude primant. Cependant le réalisateur témoigne d’une réelle pudeur : si le désir est le principal enjeu, il devient le seul objet de représentation. Aussi la sexualité n’a d’importance qu’au travers de la pulsion et de la communion vivifiante qui en résulte.
La répétition des gestes et les hiatus s’y inscrivant permettent d’appréhender l’évolution psychologique des protagonistes. La mise en scène réussit à révéler l’indicible et au-delà à esquisser les normes régissant la vie au sein d’un terrible ghetto. Epreuve ou «mauvais penchant», l’homosexualité ne se formule pas, elle est condamnée sans être pour autant envisagée pour ce qu’elle est : un homme se sentant vivre au travers du désir partagé pour et par un autre homme – l’amour en somme. Si EYES WILDE OPEN considère l’homosexualité au sein d’une communauté précise, il permet au spectateur de l’envisager pour ce qu’elle est. De la même manière qu’il met en exergue l’étroitesse de l’extrémisme religieux, quel qu’il soit.
EYES WIDE OPEN
TU N’AIMERAS POINT
***(*)
Réalisation : Haim TABAKMAN
Israël/France/Allemagne – 2009 – 90 min
Distribution : Cinéart
Drame
EA
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