Critique : Song to Song
Délire d’une vacuité crasse, SONG TO SONG est une balade musicale semi-hypnotique au gré de laquelle Terrence Malick dévoile sa vision de la scène musicale – cet autre monde en perdition dominé par l’argent et le pouvoir (de l’argent) – et livre ses fantasmes dans lesquels il met en scène un casting prodigieux qu’il réduit à de vulgaires marionnettes. Dépourvu de scénario, le film est tout à la fois la quintessence d’un travail entamé avec THE TREE OF LIFE et la démonstration des limites d’une approche esthétique masturbatoire et suffisante. Plus prétentieux encore que les personnages qu’il vomit, Malick en intègre le vide et la laideur. Un grand huit interminable dans un vide intersidéral.
Cook (Michael Fassbender) est producteur de musique, réalisateur aussi tout en se revendiquant compositeur et auteur. Il s’est construit et a réussi. Sa villa en témoigne, comme ses connaissances. Talentueux, BV (Ryan Gosling) manque d’une note de confiance en lui qui ferait de lui une star. Sous la protection de Cook, tout devient possible. Mais dans ce jeu d’amitié musicale et professionnelle s’ouvre une guerre d’égo et de pouvoir. Suivant (poursuivant?) Cook dans ses déambulations, BV lui vole sa maîtresse Faye (Rooney Mara) qui semble se confondre Rhonda (Natalie Portman), l’autre amante de son mentor, une serveuse séduite à la couleur des dollars avec lesquels Cook l’entretient.
La ligne esthétique s’impose d’entrée de jeu : une caméra virevoltante, des commentaires en voix-over comme seule ligne narrative (soit-elle un guide, pluriel, trompeur), un montage par assimilation ou continuité du mouvement… Terrence Malick sillonne l’environnement de ses personnages autant que leurs pensées. Il éclate la temporalité ; l’implose, l’explose voire l’expose. Les personnages se révèlent pluriels au fil de leurs interactions et en contraste avec les commentaires introspectifs qui font de nous leurs complices (sans commune logique). La démarche est nombriliste, comme les personnages.
Tentons-nous de nous rattacher à « l’action » ou plutôt aux interactions que nous flottons rapidement dans le flou. Objectif sans doute du réalisateur qui observe ses protagonistes – autant que ses comédiens qu’il lance dans une aventure improvisée. Nous découvrons la scène musicale d’Austin en voguant dans ses coulisses à travers l’expérience de BV, Cook ou Faye. Nous sommes témoins de leurs rencontres – épinglons Patti Smith, philosophe, et Iggy Pop. Les séquences s’enchainent comme des pistes musicales, les thématiques comme les concerts. Une expérience en soi, à condition d’y adhérer.
Condition sine qua non afin de ne pas être agacé par la suffisance, la supériorité quasi divine de Malick qui impose littéralement son point de vue au gré de son approche esthétique. Intégrant le principe de l’écriture automatique, le réalisateur livre un film ponctué de scénettes diverses (censées nourrir l’ensemble) parmi lesquelles une séquence en apesanteur où les comédiens semblent s’amuser. Nous sommes heureux pour eux. Plus sympathique que caresser de l’herbe (coucou Sean Penn), les jeux consistant à palper les rideaux avant de s’y rouler (un leitmotiv semble-t-il) nous laissent pantois. Lorsque l’attraction prend fin – essayant la réalité trouble de l’espace temps – deux possibilités s’imposent : refaire un tour ou s’enfuir (vomir). Et l’écoeurement nous a saisi.
Critique en mode album
Des titres emballants
- Commentaire en Voix-Over
- Enchâssement (désenchantement)
- Trop fluide mon mouvement
- Ouvre la bouche que tu entrouvres
- Trio amoureux
- Amitiés trompeuses
- Fucking Horny Fuckers
- Escapades saphiques
- Iggy, Patti & Moi
- En apesanteur dans un Jet privé
- Money Girl(s)
Bonus Tracks
- Confusion du sexe faible
- Virilité assumée
- Faiblesse des perverses
Song to Song: Trailer HD VO st bil par cinebel
SONG TO SONG
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Réalisation : Terrence Malick
USA – 2017 – 129 min
Distribution : Cinéart
Psychotrope hallucinogène
Dans cette histoire d’amour moderne, qui se déroule au Texas, sur la scène musicale d’Austin, deux couples – d’un côté Faye et le chanteur BV, et de l’autre un magnat de l’industrie musicale et une serveuse qu’il entretient – sont en quête de succès dans cet univers rock’n’roll fait de séduction et de trahison.