Critique : Boyhood
Richard Linklater s’est livré depuis 2002 à une expérimentation cinématographique consistant à construire un film en en étalant la rédaction et le tournage au fil des ans. Il met en scène le portrait d’un garçon de son enfance à son arrivée à l’université avec pour originalité que la distribution des protagonistes récurrents demeure la même. En observant l’évolution de son personnage, le réalisateur porte un regard sur la société américaine et son évolution tout en chantant, en parallèle, son amour pour la musique.
Si la genèse de BOYHOOD lui confère une singularité appréciable, la mise en scène du réalisateur atteste d’une palpable artificialité. Aussi ces semblent-elles en tout point fictionnelles malgré la justesse de nombreuses situations et la finesse des échanges dialogiques. S’il évite l’écueil du pathos, Richard Linklater ne transcende jamais le ressenti de ses protagonistes dont il se fait le témoin.
Empli d’humour, BOYHOOD devient un réel « petit théâtre de la vie » dont nous sommes proprement spectateurs. L’approche photographique atteste en effet d’une palpable distanciation qui inscrit le propre point de vue observant du réalisateur. Malgré un certain académisme et si l’ensemble témoigne de certaines longueurs, le montage est une des forces du film. La musique le nourrit proprement tant les choix musicaux du réalisateurs deviennent les témoins à la fois de l’évolution temporelle et de celles des protagonistes.
La mécanique scénaritisque, qui envisage le parcours d’un bambin, Mason (Ellar Coltrane), et de sa famille, est elliptique. La succession des épisodes qui mettent en scène Mason et ses proches constitue peu à peu la partition de sa vie. La ligne narrative épouse presque exclusivement le point de vue du protagoniste toutefois en s’attardant sur l’un ou l’autre personnage secondaire le réalisateur nourrit sa réflexion sur la réalité avec laquelle le film entre en dialogue.
Au-delà, au travers de cette tranche de vie et des interactions (quelques fois exquises) entre les enfants et leur parents, Richard Linklater envisage le portrait croisé de deux générations. S’il ponctue le scénario de nombreux commentaires et de réflexions politiques, il semble orchestrer un almanach musical qui loue ses idoles et marque l’évolution de ses protagonistes – Mason et sa soeur ont été bordés par Britney Spears, ont grandi avec Lady Gaga et dansent aujourd’hui sur Daft Punk.
BOYHOOD
♥♥
Réalisation : Richard Linklater
USA – 2013 – 164 min
Distribution : Lumière
Comédie dramatique
Berlinale 2014 – Compétition Officielle
mise en ligne initiale le 14/02/2014